La dinde de Noël - René Montaner


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Cet article a été publié le 09/12/2010 à 14h19 par Equinoxe B. et a été consulté 888 fois.

La Dinde de noël (Suite...)

A leur tour, le planton de l’ancienne préfecture aidé en cela par l’agent de la circulation du carrefour,se postèrent sous le palmier et s’interrogèrent longuement,sur l’intérêt ou pas de faire usage de leur arme de point !

Le risque de voir une balle perdue atteindre une cible imprévue, les en dissuada et tout le quartier, du sol aux balcons, en passant par les fenêtres, n’avait d’yeux, que pour cette pauvre dinde décapitée !

L’idée d’utiliser des frondes que nous appelions « des stacks ! » fut également évoquée mais abandonnée, pour la même raison que pour les armes à feu.

Mais alors, comment faire enfin, pour déloger cette « gourde de dinde ! » sans prendre le moindre risque pour les biens et les personnes?...

Le Préparateur de la Pharmacie « Hugonnencq » qui, comme tous les autres commerçants de la place, étaient sortis sur le trottoir, suivait avec une particulière attention le déroulement et l’évolution de la situation ;bien entendu,il se tenait prêt à intervenir,en cas de besoin…conscience professionnelle oblige !

C’est alors que…le petit cireur de chaussures de la porte de Canastel …vous savez bien !...celui dont j’ai déjà eu l’occasion de parler dans une anecdote précédente…eut une idée géniale !
« - il faut…dit-il, demander au planton de la Préfecture d’actionner la sirène de l’alerte pour incendie…et, tu verras…je suis sur que dans 10 minutes, les Pompiers seront là avec la grande échelle !… ».

… il avait raison !
Une fois l’alerte donnée, on ne tarda pas à entendre retentir les premiers « Pin..Pon..Pin..Pon… » qui descendaient par la rue Philippe.

Un renfort de policiers était venu sur place !... prêter main forte, car la circulation commençait à être sérieusement perturbée.

La rumeur circulait qu’un palmier de la place risquait de tomber à tout moment, suite à un choc violent qu’il venait de subir de la part d’un gros rapace qui se trouvait encore prisonnier dans l’arbre !!!

Quelle histoire !...on se serait cru à Marseille…mais avec l’accent en moins !

Enfin, « le Camion Amiral de la flotte des Sapeurs Pompiers d’Oran!» arriva, avec la grande échelle.

Pour tous les enfants du quartier ,c’était un peu Noël avant l’heure ; beaucoup parmi les plus petits ,avaient en effet,commander des camions et des panoplies de pompier ,au Père Noël.

De mémoire d’anciens, personne ne se souvenait d’avoir vu un jour, un aussi beau matériel !

Une fois la grande échelle déployée, deux sapeurs en gravirent les marches très rapidement et, arrivés tout prés du sommet de l’arbre, ils lancèrent sur la dinde une sorte de petit filet circulaire qui l’enveloppa et l’immobilisa définitivement.

La dinde ainsi capturée, il ne nous resta plus alors qu’à la préparer, pour la fameuse nuit de Noël…en priant Dieu …qu’elle n’ait point perdu ,après toutes ces épreuves et autres émotions,la finesse et la tendresse de sa chair.

Alors…chers amis…même si, à ce moment précis de l’histoire, vous n’êtes plus obligés de croire au père Noël ! il faut quand même que je vous dise que, après la messe de Minuit célébrée au Patronage de la rue de l’Arsenal, toute notre petite famille se trouva réunie autour d’une belle table où de multiples bougies brillaient jusque dans nos yeux.

Enfin, lorsque ma Mère arriva de la cuisine, portant sur son plus beau plat de Fête, la fameuse dinde aux marrons qu’elle avait préparée si délicatement, chacun comprit que quelque chose de mystérieux venait sans doute, de se produire.

En effet, pendant que nous étions partis à la Messe de Minuit, « la dinde aux marrons » s’était, par une mystérieuse alchimie, transformée en « une dinde aux cœurs de palmier et aux dattes confites ! »

Etait-ce là, les doux fruits de ces trois palmiers de la jolie petite place Kléber de la Marine ?

Difficile de le savoir mais, quoiqu’il en fût… je crois que chacun vit là, un miracle de Noël… et un signe du destin.
René Montaner

Ps : une grande partie de ce texte est rigoureusement « authentique ».